Gérer les résistances avec l’approche paradoxale

Comment utiliser consciemment l’approche paradoxale pour gérer certaines situations de blocage ? Exemple pratique :

Hassan qui vient de prendre la responsabilité d’une équipe dans un entrepôt est confronté à chaque réunion aux prises de paroles intempestives de Bruno. Ce dernier critique chaque décision prise, coupant la parole aux intervenants. Quand son manager lui fait une remarque, il continue de manifester par son expression du visage, ses gestes, son rire ironique, son opposition manifeste. Quand je questionne Hassan sur ce qu’il a déjà tenté pour canaliser l’attitude de Bruno, il apparait qu’il anticipe déjà avant la réunion les flèches de son équipier. Il est déjà tendu avant même que la réunion soit lancée. Durant la réunion, il fait tout pour éviter que Bruno prenne la parole…et à chaque fois que ce dernier s’exprime, son non verbal ne peut réprimer son agacement et sa crainte. Pourtant, il semble que les prises de parole de Bruno soient souvent pertinentes sur le fond ; mais Hassan perçoit leur forme comme une remise en question de son autorité. Bruno de son côté sort frustré de chaque réunion, n’ayant pas eu l’occasion de s’exprimer et prêt à en « découdre » davantage lors de la réunion suivante. Lors de la séance suivante, Hassan avoue être dans une impasse. Nous envisageons alors de canaliser différemment les prises de parole de Bruno en leur laissant un espace dédié en début de réunion. Dès la réunion suivante, Hassan donne la parole à Bruno et l’invite, sans ironie aucune, à donner son avis critique et constructif sur une nouvelle procédure. A sa grande surprise, la prise de parole de Bruno est bien plus mesurée que d’habitude. Il gardera d’ailleurs cet état d’esprit durant toute la réunion. Hassan n’en revient pas ! Pour renforcer cette nouvelle dynamique lors des réunions suivantes, Hassan a même l’idée d’utiliser le regard critique et pertinent de Bruno pour identifier les risques potentiels à chaque nouveau projet, ce que ce dernier fait avec beaucoup d’application tout en restant dans le périmètre qu’Hassan lui a attribué.Hassan a réussi à inverser la dynamique relationnelle engagée en utilisant une approche paradoxale. En demandant à Bruno de s’opposer, celui-ci l’a mis dans une situation pour laquelle les 2 issues possibles sont favorables au manager. Si Bruno continue de s’opposer, il n’est plus opposant puisqu’il le fait à la demande de son manager…et s’il arrête de s’opposer (pour rester opposant ) et bien le manager atteint son objectif car la dynamique des réunions est plus constructive ! Au-delà de cette dimension stratégique, Bruno se sent valorisé puisqu’enfin son manager donne de la valeur à son avis sans se crisper à chacune de ses prises de parole. Les maitres de l’École de Palo Alto appelle cette technique une prescription de symptômes !

Auteur de l’article : Sébastien Motechic