On a tous lu qu’un collaborateur quitte un manager et pas une entreprise…
Que les managers sont les garants du bien-être, de la motivation et du développement de leurs collaborateurs…
Qu’il est essentiel de former les managers pour développer leurs compétences relationnelles et managériales …
C’est vrai, du moins en partie.
Mais on occulte trop souvent un autre paramètre majeur qui est que les managers évoluent au sein d’une organisation. Une organisation qui peut restreindre ou au contraire élargir leurs marges de manœuvre, une organisation qui se repose beaucoup sur le management intermédiaire sans toujours prendre la mesure des moyens qu’il faudrait lui allouer.
Le rôle de manager subit une sorte de désenchantement aujourd’hui car c’est un rôle « sous pression » : charge de travail et charge mentale, pression des objectifs, difficultés de recrutement, évolution des attentes des collaborateurs, besoin d’adaptation aux individus et au collectif tout en répondant à la demande de performance de l’organisation … Focus sur quelques contraintes dans le rôle de manager.
La question du temps de management :
C’est l’une des difficultés les plus remontées par les managers, celle du temps qui leur est octroyé (ou pas) pour manager. Être manager, c’est la plupart du temps à la fois « produire », piloter une activité et manager une équipe. Et lorsque l’on pose la question du temps dédié au management, les réponses oscillent généralement entre 5% et 10%. 10% pour expliquer, communiquer, donner du sens à la stratégie de l’entreprise, créer, développer et maintenir la relation avec chacun de ses collaborateurs, s’assurer de leur bien-être et être attentif à leurs éventuelles difficultés, valoriser, faire des feedbacks, briefer, débriefer, animer la dimension collective, développer la cohésion, coconstruire… Et faute de temps, le management devient une pesée de risque qui ne bénéficie que trop peu au volet humain.
Les injonctions paradoxales :
Difficile d’assoir son rôle de manager au sein d’une structure qui envoie des messages contradictoires…
- On demande aux managers de faire preuve d’initiative, d’innover, de développer ces compétences dans leur équipe mais il faut respecter les nombreux process qui régissent et codifient précisémentla manière d’exécuter les tâches dans l’entreprise.
- On plébiscite une nécessaire évolution des modes de management et des pratiques managériales, mais on n’évalue les managers la plupart du temps que sur des métriques opérationnelles.
- On leur demande de faire vivre les valeurs de l’entreprise comme la satisfaction client ou le bien-être des collaborateurs, mais toutes les prises de parole de l’organisation ne portent que sur les résultats business, mettent l’accent sur les objectifs qui ne sont pas atteints, l’implicite étant que le reste n’est pas important.
La position :
Le manager est lui-même un collaborateur. Pour qu’il puisse « prendre soin » des autres, il faut qu’il soit en état de le faire…
Comment veiller à la motivation de son équipe quand on est soi-même en doute ? Comment prévenir les risques psychosociaux quand on est stressé, en surcharge ?
Comment donner du sens, laisser de l’autonomie, quand on ne sait pas soi-même pourquoi cette nouvelle stratégie ou cette décision a été prise, quand on a aucune marge de manœuvre et que l’on doit faire valider à toute la chaîne hiérarchique la moindre décision ?
Prendre soin des managers, c’est non seulement les former, les accompagner mais aussi réfléchir de manière plus globale à leur rôle au sein de l’organisation, et repenser comment l’organisation peut leur permettre d’incarner leur rôle et leur donner la marge de manœuvre nécessaire à la réussite de leurs enjeux.